Rumäniendeutsche Literatur. 40 Jahre "Aktionsgruppe Banat"

numéro 3/2012 des Études Germaniques

Études réunies par Dorle Merchiers

Sommaire :

Dorle MERCHIERS : Avant-propos

APPROCHES HISTORIQUES ET HISTORIOGRAPHIQUES

Jean-Paul BLED : Le Banat. Un panorama historique
Jean-Marie VALENTIN : « Rumäniendeutsche Literatur » – une question d'historiographie littéraire
Ernest WICHNER : « Aktionsgruppe Banat » – die erste und letzte deutschsprachige Dichterschule in Rumänien


ÉTUDES LITTÉRAIRES

Olivia SPIRIDON : Die rumäniendeutsche Literatur nach dem Zweiten Weltkrieg. Eine Überblicksdarstellung
Markus BAUER : Kritische Theorie in Temeswar – Zum Epochenhintergrund der « Aktionsgruppe Banat »
René KEGELMANN : Materielle und mentale Räume in Herta Müllers Roman Atemschaukel
Ute WEIDENHILLER : Das Unsagbare sagbar machen – Herta Müllers doppelbödige Poetik

DÉBAT
Robert THEIS : Kant et l'Aufklärung

NOTE ET DOCUMENT
Gilbert MERLIO : Nietzsche et Voltaire. Parallèles littéraire et philosophique

BIBLIOGRAPHIE CRITIQUE
NOTICES BIBLIOGRAPHIQUES
In Memoriam Pierre Cimaz
OUVRAGES REÇUS

Die rumäniendeutsche Literatur nach dem Zweiten Weltkrieg. Eine Überblicksdarstellung

The Romanian-German literature after World War II enjoys a special place for a number of reasons. First of all, it is a minority literature, with all socio-psychological implications. Furthermore, this literature developed in one of the most absurd dictatorships in Europe during the 20th century. In addition, as a result of the mass migration of Romanian-German writers in the Federal Republic of Germany since the late 1960s another phenomen can be observed : the transformation of this minority literature into the German-speaking migrant literature. The paper at hand aims at a general survey of this literature in the context of the historical facts and the cultural policy in Romania after 1945.

La littérature allemande de Roumanie jouit, depuis la Seconde Guerre mondiale, d'un statut particulier. Il y a à cela plusieurs raisons. L’on a affaire en premier lieu ici à une « littérature de minorité », avec ce que tout cela implique du point de vue so-cio-psychologique. En second lieu, cette littérature s’est développée sous l’une des dictatures les plus absurdes du XXe siècle. En outre, l’émigration intense d’écrivains roumains, quittant la Roumanie pour la République Fédérale d’Allemagne à partir de la fin des années 1960, fait apparaître un phénomène supplémentaire : l’insertion de cette « littérature de minorité » dans la littérature de langue allemande issue des diverses immigrations. On tente ici de donner de cette littérature une vue d’ensemble, prenant en considération les faits historiques et la politique culturelle roumaine depuis 1945.

Kritische Theorie in Temeswar – Zum Epochenhintergrund der « Aktionsgruppe Banat »


The literary « Aktionsgruppe Banat » which had caused a sensation in Romania as well as in Germany after the departure of most of its members came into being and developed at the beginning of the 1970s in a very special milieu of communist Romania. In a complex epoch of a sort of ‚liberalization’ of the Romanian dictatorship young writers were able to assimilate intensively western literature and culture. They were even able to adapt in the region of the Banat the by US and European revolting youth widely read and discussed « Frankfurt School » of « Critical Theory ». Writings by Walter Benjamin, Herbert Marcuse and others, but also the life style of the revolting youth were adapted in by the « Aktionsgruppe Banat » in Temeswar/Romania.

Le groupe littéraire « Aktionsgruppe Banat », qui s’est manifesté avec éclat en Roumanie et avec la même vigueur en Allemagne après le départ de la plupart de ses membres pour la République Fédérale, s’est développé au début des années 1970 dans un milieu particulier du régime communiste roumain. Au cours d’une phase très complexe de « libéralisation » de la dictature roumaine, les jeunes -auteurs eurent la possibilité d’accueillir de manière active la culture et la littérature occidentales jusqu’à mettre au centre de leur intérêt la Théorie critique de l’École de Francfort qui avait fait l’objet d’une réception multiple auprès de la jeunesse révoltée d’Amérique et d’Europe.Les écrits de Walter Benjamin, d’Herbert Marcuse, etc. mais aussi le style de vie de cette jeunesse révoltée firent à Temeswar/Timisoara l’objet de débats intenses tout en y étant pris comme modèles.

Materielle und mentale Räume in Herta Müllers Roman Atemschaukel

This contribution examines Herta Müller’s novel Everything I Possess I Carry With Me (Atemschaukel, 2009), using a spatial approach. The import of memory for the perception of spaces is highlighted and exemplified by how the first-person narrator Leopold Auberg recounts and reflects upon his experiences – experiences that are linked to two places in particular, i.e. Hermannstadt/Transylvania and a labour camp in Ukraine. Additionally, the transit zone connecting these two places is explored. It is demonstrated that although the novel provides precise topographical markers, it also contains imagined spaces, namely when Leopold Auberg connects the two settings by conjuring up images of them. Moreover, this contribution investigates how by coining neologisms, Herta Müller created aesthetically condensed images of fear, silence und hunger – images that evoke a specific spatial structure.

La présente contribution analyse le roman La Bascule du souffle (2009) de Herta Müller dans la perspective de la représentation de l’espace. L’accent est mis sur l’importance du souvenir au regard de la perception de l’espace par le Moi narrateur Leopold Auberg face aux événements tels qu’il les vit et réfléchit. Un éclairage plus fort se porte sur les deux espaces de l’action, Hermannstadt (Sibiu) en Transylvanie et un camp de travail en Ukraine, de même que sur la zone de passage qui relie ces deux lieux. En dépit d’indications topographiques précises, c’est l’élaboration d’un espace hautement mental qui s’impose, ainsi lorsque Leopold Auberg instaure un lien conscient entre ces deux lieux de l’action. Sur la base de néologismes et de condensations verbales viennent au jour les chiffres esthétiques de l’angoisse, du silence et de la faim qui donnent jour à leur tour à une structure spatiale spécifique.

Das Unsagbare sagbar machen – Herta Müllers doppelbödige Poetik

The works of Herta Müller provide complex reflections on spoken and written language and its multi-faceted nature. Her writing, which is heavily marked by the fear of the political repression she experienced, asserts the incapacity of language to express reality and seeks alternative ways to articulate what is impossible to say. Müller is aware of the ambiguity of words and mingling Jorge Semprún’s « invented perception » and Georges-Arthur Goldschmidt’s concept of « autofictionality » with the technique of the « estranged gaze » she creates her own peculiar language in order to convey her experience.

L’œuvre de Herta Müller est marquée par des réflexions complexes sur les facettes multiples du langage et de l’écriture. La contradiction, qui existe entre -l’insuffisance de la langue en tant que mode d’expression approprié de la réalité et la recherche simultanée des possibilités de dire l’indicible, constitue le point de départ d’une écriture qui, influencée d’abord par les représailles endurées directement de la part du système politique, porte l’empreinte de l’angoisse vécue.

Sensibilisée à la portée équivoque des mots, l’auteure crée à son propre usage une langue singulière, qui n’appartient qu’à elle. En relation avec les notions de « perception imaginée » et d’« autofiction » empruntées à Jorge Semprun et Georges-Arthur Goldschmidt autant qu’à la technique du « regard étranger », cette langue acquiert la capacité de représenter l’expérience vécue.
Dates
Paru le 5 mars 2012, Créé le 2 janvier 2014
Éditeur
Klincksieck, 2012